Publication de la loi 3DS : Le SYNCASS-CFDT accompagne les directeurs concernés

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Suite à la publication de la loi 3DS, le SYNCASS-CFDT revient sur les conséquences de l’adoption de l’article 143 imposant le détachement des chefs des établissements de la protection de l’enfance dans la fonction publique territoriale. Il signale dans ce document informatif les principaux points de vigilance à exercer pour sa mise en œuvre. Il accompagnera tous les chefs d’établissement concernés qui le souhaiteront.

Il vous invite par ailleurs à relire le bilan de ses actions et propositions alternatives à cette disposition baroque de la loi 3DS.

La loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dite 3DS, est publiée au journal officiel du 22 février. Si elle a subi une ultime modification dans la présentation de ses dispositions, l’article 40 devenu 143 reste inchangé :

I – Au terme d’un délai maximal d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, les fonctionnaires relevant de la fonction publique hospitalière nommés dans les fonctions de directeur des établissements mentionnés à l’article L. 315-8 du code de l’action sociale et des familles exercent ces fonctions en position de détachement dans les cadres d’emplois équivalents de la fonction publique territoriale, dans les conditions prévues par le code général de la fonction publique. En cas d’absence de cadre d’emplois équivalent, ils sont détachés sur un contrat de droit public dans les conditions prévues par le même code.

Les fonctionnaires concernés conservent, s’ils y ont intérêt, le bénéfice du régime indemnitaire qui leur était applicable.

II – Dans le délai fixé au premier alinéa du présent I, les agents contractuels exerçant la fonction de directeur des établissements mentionnée au même premier alinéa relèvent de plein droit des conseils départementaux dans les conditions d’emploi qui sont les leurs. Ils conservent, à titre individuel, le bénéfice des stipulations de leur contrat.

– L’article L. 315-8 du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :

1° Après le mot : « surveillance », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « et d’un directeur nommés par le président du conseil départemental. » ;

2° À la fin du second alinéa, les mots : «, après avis du président du conseil d’administration, par l’autorité compétente de l’Etat » sont remplacés par les mots : « par le président du conseil départemental ».

Mise au point du SYNCASS-CFDT

Contrairement à ce qui a pu être communiqué par une organisation syndicale début février, ces dispositions ne s’appliquent qu’aux chefs des établissements relevant des services départementaux de l’aide sociale à l’enfance et les maisons d’enfants à caractère social.

Les directeurs adjoints ne sont nullement concernés !

Dès lors qu’il est fixé par la loi, le détachement s’impose et ne peut être refusé, ni par le directeur, ni par le président du conseil départemental. Les directeurs, chefs d’établissement, occupant ces emplois et les présidents des conseils départementaux disposent maintenant d’un délai maximal d’un an pour procéder aux démarches et aux discussions indispensables au détachement dans un cadre d’emploi de la fonction publique territoriale. Tout directeur conserve évidemment le choix de candidater sur un autre emploi.

Les conséquences sur la gestion administrative des chefs d’établissement

Elles dépendent de la forme du détachement mais ne coupent nullement le lien avec le CNG qui assurera toujours le suivi de leur carrière dans la FPH :

  • S’ils sont détachés dans le corps des administrateurs territoriaux, seul corps comparable au sens du code général de la fonction publique, leur gestion se fera en application des règles statutaires du corps de détachement et de la fonction publique territoriale, faisant intervenir le Centre national de la fonction publique territoriale.
  • S’ils sont détachés sur contrat de droit public, ils ne bénéficieraient pas de ces règles, restant dans une gestion confiée au seul président du conseil départemental.
Mise au point du SYNCASS-CFDT

La nomination par le président du Conseil départemental pourrait donner l’illusion que le recrutement, comme la fin de la relation de travail avec le Conseil départemental par retrait de l’emploi, sera facilitée pour gérer certaines « situations complexes ». Cela été avancé dans les arguments défendus par les administrations publiques concernées, dont le CNG, alors que :

  • La gestion d’un détachement ne se soustrait pas aux règles statutaires générales. La volonté, pour un conseil départemental, de mettre fin à un détachement avant son échéance ne le dispense pas de l’obligation de maintenir la rémunération intégrale du directeur, tant qu’il n’aurait pas retrouvé un emploi. Seule une faute reconnue selon les procédures requises autoriserait une interruption du détachement avant le terme de sa durée (Article L513-28 du code général de la fonction publique).
  • Les D3S restent titulaires de leur corps et grades. Le CNG aura bien toujours la responsabilité de gérer ces situations complexes et la carrière des intéressés.

Les points de vigilance pour la carrière

Le corps des D3S a été reconnu comparable à ceux des directeurs d’hôpital, administrateurs civils et territoriaux en application des dispositions de la loi n° 2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique. Tout détachement doit donc s’effectuer par priorité dans le corps des administrateurs territoriaux. C’est bien ce que prévoit la loi 3DS dans son article 143. La référence au cadre d’emploi en vigueur dans la FPT correspond bien à celle de corps dans les deux autres versants. Les règles de détachement applicables prévoient un reclassement à équivalence de grade tel que prévu au 1er alinéa de l’article 11-1 du décret n°86-68 du 13 janvier 1986 relatif aux positions de détachement, de disponibilité, de congé parental des fonctionnaires territoriaux et à l’intégration : « Lorsque le détachement est prononcé dans un cadre d’emplois, il est prononcé à équivalence de grade et à l’échelon comportant un indice égal ou, à défaut, immédiatement supérieur à celui dont l’intéressé bénéficie dans son grade d’origine ». Cela garantit le maintien du traitement indiciaire. C’est par exemple ce qui a été réalisé lors du passage à la FPT des établissements du Centre d’action sociale de la Ville de Paris (CASVP) au 1er janvier 2020 pour l’ensemble des directeurs, chefs et adjoints.

Mise au point du SYNCASS-CFDT

De nombreux témoignages d’adhérents concernés nous indiquent que certains présidents de conseils départementaux n’envisageraient pas un détachement dans le corps des administrateurs territoriaux. Ce serait alors un détachement sur contrat de droit public qui s’appliquerait.

Mais l’article 143 de la loi est sans aucune ambiguïté : il ne permet le détachement sur contrat de droit public qu’en l’absence de cadre d’emploi équivalent, ce qui ne sera pas toujours le cas et devra être vérifié.

Pour le SYNCASS-CFDT, il est hors de question d’admettre la perte de garantie de carrière, ni de rémunération par un recours sans contrôle au contrat. Car à la différence du statut, le contrat n’offre aucune possibilité de déroulement de carrière et fige le plus souvent la rémunération pour sa durée. Le détachement dans le corps ou cadre d’emploi permet quant à lui un déroulement de carrière poursuivi dans les deux corps (D3S et administrateur territorial). De même, lors de l’intégration dans le corps d’accueil ou de la réintégration dans le corps d’origine, c’est la meilleure des deux carrières qui est reprise.

Pour les D3S, le détachement dans un corps d’administrateur territorial est une meilleure garantie statutaire, en conservant la carrière dans le corps d’origine.

La loi ne donne aucune garantie sur la durée minimale de détachement, mais s’agissant d’une position pérenne imposée au fonctionnaire et à l’administration par la loi, le détachement de longue durée s’impose.

Le SYNCASS-CFDT accompagnera tous les collègues concernés en leur faisant bénéficier de son expérience dans la gestion de situation similaires de détachement, notamment en sollicitant la mobilisation du CNG à l’identique de ce qui a été réalisé pour les directeurs du CASVP.

Les points de vigilance pour le régime indemnitaire

L’article 143 précise que les fonctionnaires concernés conservent, s’ils y ont intérêt, le bénéfice du régime indemnitaire qui leur était applicable. Cette formulation signifie que la situation de départ est figée au niveau acquis et qu’aucune garantie n’est proposée sur l’évolution de ce régime indemnitaire. De même les régimes indemnitaires et leurs plafonds présentent des différences significatives.

Le régime indemnitaire des directeurs D3S est la PFR, selon le décret n° 2012-749 du 9 mai 2012 relatif à la prime de fonctions et de résultats des corps ou emplois fonctionnels des personnels de direction et des directeurs des soins de la fonction publique hospitalière :

Plafonds Plafonds de part F Plafonds de part R
Emplois Fonctionnels 49 800 € 60 % soit 29 880 € 40 % soit 19 920 €
Échelon Fonctionnel 45 600 € 60 % soit 27 360 € 40 % soit 18 240 €
Hors Classe 40 000 € 60 % soit 24 000 € 40 % soit 16 000 €
Classe Normale 36 000 € 60 % soit 21 600 € 40 % soit 14 400 €

Les administrateurs territoriaux sont sous le régime du RIFSEEP institué en application du principe d’équivalence avec les corps de la fonction publique de l’Etat par le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 portant création d’un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l’expertise et de l’engagement professionnel dans la fonction publique de l’Etat.

À titre indicatif, les montants plafonds sont les suivants pour les administrateurs territoriaux :

Groupes Indemnité de fonctions, sujétions et expertise Complément indemnitaire annuel Montant total maximal brut annuel *
Montant maximal brut annuel Montant maximal brut annuel
Groupe 1 49 980 € 8 820 € 58 800 €
Groupe 2 46 920 € 8 280 € 55 200 €
Groupe 3 42 330 € 7 470 € 49 800 €

 *ces plafonds sont identiques en valeur à ceux des directeurs d’hôpital de la classe normale à la classe exceptionnelle.

Ceux des attachés territoriaux sont bien inférieurs, y compris à ceux de la PFR des D3S :

Groupes Indemnité de fonctions, sujétions et expertise Complément indemnitaire annuel Montant total maximal brut annuel
Montant maximal brut annuel Montant maximal brut annuel
Groupe 1 36 210 € 6 390 € 42 600 €
Groupe 2 32 130 € 5 670 € 37 800 €
Groupe 3 25 500 € 4 500 € 30 000 €

 

Mise au point du SYNCASS-CFDT 

Le RIFSEEP est plus complexe à estimer que la FPR des directeurs de la FPH. Chaque Conseil départemental dispose d’une délibération propre en vertu du principe constitutionnel de libre administration des collectivités locales. Ils ne peuvent cependant s’affranchir des dispositions maximales appliquées aux fonctionnaires de l’Etat.

La simulation des montants indemnitaires dépendra ainsi des informations officielles que tout directeur placé dans la situation imposée par l’article 143 de la loi est en droit de recevoir des services RH du département.

À noter aussi que tout comme dans le cadre de la PFR, le RIFSEEP est plafonné pour la seule IFSE en cas de logement par nécessité absolue de service mais dans une proportion bien moindre que la part fonction de la PFR des directeurs de la FPH.

 Le SYNCASS-CFDT vous accompagnera dans ces démarches. Il pourra mobiliser ses contacts avec les syndicats de la fédération CFDT-INTERCO (qui syndique les agents de la FPT) pour cela.

Les points de vigilance pour le logement pour nécessité absolue de service

Les directeurs de la FPH bénéficient d’une concession de logement par nécessité absolue de service dont les conditions sont définies par le décret n° 2010-30 du 8 janvier 2010 modifié pris en application de l’article 77 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière. Il précise que « tous les directeurs : directeurs d’hôpitaux, directeurs d’établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux, directeurs des soins, sont tenus, du fait de leurs fonctions, de participer aux gardes de direction et logés ou indemnisés à ce titre ». Or, dans la fonction publique territoriale, l’attribution de logement pour nécessité absolue de service est conditionnée à une délibération de la collectivité locale.

 Mise au point du SYNCASS-CFDT

Cette question est sans doute celle qui soulève la question de droit la plus épineuse, car comment imaginer que la collectivité départementale est fondée à prendre une telle délibération pour un emploi qui demeure en tout état de cause dans le champ de la fonction publique hospitalière ?

En effet, les établissements concernés par l’article 143 relèvent toujours du champ de la fonction publique hospitalière (article 2- 4° de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière). Ils en constituent d’ailleurs des emplois supérieurs tels que visés à l’article 1-4° du décret n° 2020-959 du 31 juillet 2020 relatif aux emplois supérieurs de la fonction publique hospitalière qui régit les conditions pour y accéder.

Défini par le décret n°2010-30 du 8 janvier 2010, l’application de ces dispositions pour un emploi demeurant dans la fonction publique hospitalière reste valable. Mais l’appliquer à un personnel nommé dans un cadre d’emploi de la fonction publique territoriale est discutable en droit.

On retrouve ici la contradiction initiale d’un dispositif juridiquement baroque.

 Mais il reste encore de nombreux points à régler qui, pas plus qu’ils n’ont fait l’objet d’une étude précise d’impact au préalable, n’ont reçu aucune réponse à nos alertes successives en particulier sur l’application du régime de la protection sociale. Enfin, au-delà du détachement imposé pour les chefs d’établissement directeurs de la FPH concernés, le processus des recrutements futurs ne semble pas modifié selon les dispositions du décret « emplois supérieurs », le CNG resterait donc compétent. Si cela est confirmé, alors l’articulation avec les conseils départementaux est à préciser.

Le SYNCASS-CFDT est dès à présent et comme toujours aux côtés des directeurs concernés par le détachement dans la FPT qu’impose cette loi, pour défendre leurs intérêts et les conseiller. Il saisira la DGOS et le CNG pour répondre à toutes ces questions restées sans réponse.

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