L’édito de Maxime MORIN – Octobre / Novembre 2024

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L’actualité internationale de ces dernières semaines est marquée par l’élection américaine et ses prolongements dans le monde entier. La nette victoire de Donald TRUMP a une résonance particulière, différente de la sidération qu’avait suscitée sa première élection en 2016. L’exercice du pouvoir durant son premier mandat n’a pas produit l’atténuation de ses positions marquées par des propos outranciers, des allégations mensongères et des options tranchées en termes de commerce international, d’immigration ou de politique extérieure.

La lecture de cette élection peut sembler distante des préoccupations de nos secteurs. Pourtant, on discerne un impact certain qui touche toutes les sociétés, la mise en scène de la brutalité assumée, la distorsion volontaire des faits, l’autocélébration personnelle en lieu et place de politiques détaillées et chiffrées conduisant au succès et se nourrissant de nouveaux excès. En témoignent les premières nominations du gouvernement, largement mises en scène : Elon MUSK qui proclame un pseudo-programme de démantèlement de grande ampleur de l’Etat fédéral et Robert KENNEDY Jr à la santé qui affiche sans complexe des opinions contraires à la vérité scientifique, en particulier sur la nature et les conséquences de l’épidémie du COVID et l’intérêt réaffirmé de la vaccination. A ce propos, on mesure une nouvelle fois combien cette crise sanitaire a des effets à longue portée dans le débat public, offrant un débouché à des opinions complotistes qui bénéficient d’une reconnaissance de premier plan. L’instrumentalisation d’un ressentiment diffus envers les élites est flagrante mais il faut bien admettre que la lutte contre la désinformation est ardue. La place prise par des réseaux sociaux, ni régulés ni modérés, où des groupes d’influence affiliés et financés, directement ou indirectement par des états, prospèrent sans frein y contribue puissamment.

Cette brutalité érigée en recette de succès politique doit nous alerter et nous mobiliser. Car l’engouement pour cette rhétorique a des prolongements concrets sur le management des établissements et des organisations. La réponse simple et binaire à la complexité des situations devient un maître mot et se donne les apparences du volontarisme. La recherche d’équilibres et de compromis entre des points de vue divers, principe fondateur des sociétés démocratiques, est disqualifiée. La lecture de la réalité est présentée de façon simpliste, désignant des ennemis intérieurs et extérieurs ou des obstacles à écarter sans ménagement au mépris des faits.

Phénomène inquiétant, les dirigeants autoritaires n’ont plus l’apanage de cette tendance délétère à la simplification et aux raccourcis. Et pas non plus l’exclusivité de la désignation commode de responsables de tous les maux. La façon dont l’actuel ministre de la fonction publique, de la simplification et de la transformation de l’action publique présente les objectifs de son action est éclairante à cet égard : il s’agit d’une critique confuse de la bureaucratie mais surtout une attaque en règle contre les fonctionnaires et les agents publics. Cela revient à imputer le marasme des finances publiques aux agents, non à des décisions politiques et au pilotage économique de la nation. Les organisations représentatives des personnels médicaux et non médicaux, dont la CFDT, appellent dans une belle unanimité à se mobiliser le 5 décembre pour exprimer leur dépit.

Dans ce contexte, le dialogue social est somme toute considéré comme quantité négligeable et les représentants des salariés comme des obstacles à contourner ou à neutraliser. La lecture du récent rapport de la Cour des comptes sur la loi de transformation de la fonction publique de 2019 et ses prolongements est éclairante à cet égard. Si le style est policé, le fond laisse apparaitre la philosophie profonde de ce texte : derrière la simplification des instances et l’invocation d’un dialogue « plus stratégique », c’est bien le recul de la capacité des représentants syndicaux à peser sur les choix opérés qui était recherché.

Le sens des positions de la CFDT dans son ensemble est de dénoncer cette pente dangereuse et de trouver les voies et moyens d’y faire pièce. Nous avons la conviction que les tensions que nos sociétés doivent gérer, les défis qu’elles doivent relever, climatique, démographique et de cohésion sociale, passent par la pleine reconnaissance de contre-pouvoirs autonomes. Le SYNCASS-CFDT s’inscrit dans ce combat. Il lui fera écho à travers les présentations et les débats qui animeront ses journées nationales. Elles marqueront, dans une atmosphère conviviale, l’expression de notre force collective.