Instance collégiale DH du 20 avril 2022 – L‘hôpital proche de l’implosion : où sont les solutions ?

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Jamais le contexte hospitalier n’a été aussi difficile. Les témoignages se multiplient qui alertent sur une situation de plus en plus alarmante qui se caractérise par un délitement de l’offre de soins du fait d’un absentéisme et d’une fuite des professionnels sans précédent. Malgré cela, les directeurs qui font au mieux pour assurer la continuité du service public ne voient aucune perspective.

La déclaration liminaire

Cette nouvelle réunion de l’instance collégiale qui va examiner les candidatures à huit emplois supérieurs se déroule dans un contexte totalement inédit et, disons-le, particulièrement alarmant. Nous ne pouvons pas le passer sous silence

La situation sur le terrain, déjà tendue par deux ans de crise sanitaire et un engagement extraordinaire des professionnels de la FPH, s’est encore aggravée. Nombreux sont les témoignages de collègues qui illustrent le délitement qui se joue sous nos yeux, d’explosion des équipes et donc des établissements, soumis à une terrible pression à laquelle il leur est impossible de faire face. L’hôpital public vacille et les solutions demeurent invisibles.

Confrontés à une forte activité saisonnière et à une recrudescence des hospitalisations pour COVID et grippe, les directeurs se débattent au quotidien avec un absentéisme immaîtrisable conjugué à des fuites de professionnels médicaux et soignants, entraînant, outre la saturation des services d’urgence, d’inévitables fermetures de lits. Ils constatent, impuissants, que des pans entiers de l’offre de soins se lézardent. Le temps des cellules de crise, des plans blancs et des déprogrammations d’activité reste malheureusement toujours de circonstance, sans plus pouvoir trouver les remèdes à l’épineuse problématique faisant reposer sur l’hôpital et lui seul la permanence des soins à garantir.

Nul besoin de longs développements sur la situation. Il suffit de prendre le temps d’écouter le terrain aux quatre coins du pays. Ici, un collègue évoque une situation explosive, le casse-tête d’un taux d’absentéisme ayant pris deux points de plus en moyenne, 40 postes infirmiers vacants, 35 lits fermés et 15 patients hospitalisés dans les urgences faute de place dans les étages chaque nuit, mais aussi une pédiatrie fragilisée que le CHU de référence ne peut pas soutenir, contraignant à une régulation de l’accès des patients.

Là, c’est une forte tension interne avec activité soutenue aux urgences, un taux d’hospitalisation plus élevé qu’habituellement et de nombreux lits d’aval fermés y compris en SSR et EHPAD/USLD, saturant complètement les filières personnes âgées dont le maintien à domicile n’est pas plus garanti. Le CHU proche doit même faire appel, via l’ARS, à la solidarité territoriale, faute de ressources suffisantes du fait de 200 postes infirmiers vacants.

Ailleurs, une situation critique est remontée, avec des urgences au CHU en très grande difficulté, des SAU proches complètement fermés ou recentrés la nuit sur les seules urgences vitales, et une saturation des capacités de médecine avec une lourdeur de prise en charge et des DMS qui augmentent sans cesse.

On ne compte plus les communiqués de presse, messages sur les réseaux sociaux, interviews… émanant aussi bien des hôpitaux que des ARS invitant les patients à différer leur venue aux urgences ou reporter des soins non urgents. Le temps d’attente dans les SAU explose, les risques d’erreur se multiplient, les équipes n’osent plus regarder dans les yeux les patients « stockés » sur des brancards, les questions des familles sont esquivées, par crainte de devoir avouer son impuissance.

Et que dire d’un CH contraint à la quasi fermeture de la seule maternité du département faute de sage-femmes dans un contexte d’arrêts maladie suite à épuisement professionnel ! Certes les urgences obstétricales restent accueillies, mais pour accoucher, les parturientes sont orientées dans des établissements situés entre 60 et 180 kms de distance !

Les exemples pourraient être multipliés à l’envie. Nous voilà plongés dans une situation impensable proche de la catastrophe. Jamais n’ont été cumulées tant de situations de saturation, de fermetures, de fonctionnement dégradé. Jamais les directeurs n’ont eu en main aussi peu de solutions concrètes à mettre sur la table. Face à un tel niveau d’affaiblissement, après ce que le système de santé a enduré ces deux dernières années du fait de la pandémie, comment conserver des équipes mobilisées, alors que les personnels les plus engagés sont épuisés ? Comment donner des perspectives rassurantes ?

Et pendant ce temps-là, la publication et la perspective d’application début 2023 de l’ordonnance relative au régime de la responsabilité financière des gestionnaires publics, qui fait bon marché de la spécificité des établissements de santé et médico sociaux autonomes, ne peut générer que de l’inquiétude. Particulièrement pour les chefs d’établissements et leurs adjoints DAM et DRH pris en étau, qui doivent recourir à des expédients non règlementaires pour maintenir tant bien que mal les activités essentielles du service public, comment rester sereins devant des contradictions aussi inextricables ?

Pour sortir du tunnel, l’hôpital et le secteur social et médico-social publics, sommés d’assumer seuls tant de missions essentielles et de répondre à tant de maux de la société, ne voient rien venir. Quid de l’équité de traitement et de considération de tous les fonctionnaires de la FPH ? Quid de l’alignement des responsabilités et des rémunérations entre public et privé ? Quid surtout de la régulation des installations de médecins ou du rétablissement de l’obligation de permanence des soins des libéraux ?

Oui, l’hôpital public est proche de l’implosion. Il est urgent de reprendre la main et de conforter l’exercice si contraignant des directeurs et de leurs équipes en ces temps de grand désarroi.

 Télécharger le communiqué