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Instance collégiale D3S du 26 janvier 2023 – Une réforme en occulte d’autres : ne perdons pas de vue les priorités de notre secteur

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Cette première instance de l’année, qui se déroule entre deux journées de mobilisation, est l’occasion de rappeler les effets néfastes de la réforme des retraites sur un secteur qui connaît déjà une crise d’attractivité de ses emplois sans précédent. Les directeurs ne font pas exception, comme le démontre le nombre toujours plus important de postes restés sans candidatures. Il est urgent que des mesures appropriées soient mises en œuvre pour que le corps des D3S cesse d’être au mieux un corps de passage vers celui des DH ou au pire un corps en voie d’extinction. Cela passe désormais par la déclinaison de la réforme de la haute fonction publique dans le versant FPH. Le SYNCASS-CFDT souhaite voir s’ouvrir une négociation formelle portant sur l’amélioration des statuts de l’ensemble des directeurs de la fonction publique hospitalière.

Cette première séance de l’instance collégiale se déroule entre deux journées de mobilisation intersyndicale contre la réforme des retraites présentée par la Première ministre le 10 janvier dernier. Le SYNCASS-CFDT, comme il l’a déjà communiqué, reste mobilisé contre cette réforme car les directeurs seront nombreux à être impactés en fonction de leur âge et du début de leur carrière.

Mais au-delà, ils mesurent d’ores et déjà ses conséquences négatives sur les personnels des établissements de la FPH particulièrement exposés à la pénibilité dans leurs métiers et fonctions. Le choix de décaler de deux ans l’âge de départ y compris celui des catégories actives complexifiera la gestion de leur fin de carrière. L’essentiel de l’effort porte sur les salariés exposés à des emplois pénibles et, pour nombre d’entre eux, rémunérés sur les grilles les plus basses de la catégorie. Cette mesure est injuste et envoie un signal particulièrement négatif dans le contexte des difficultés actuelles, au risque de les aggraver.

Pour le SYNCASS-CFDT, la réponse laissée ouverte de départs anticipés n’exonère pas de la responsabilité à la fois d’actions de prévention et de reclassement dans des fonctions compatibles avec les aptitudes et les souhaits des agents. A cet égard, l’annonce de la création d’un fonds pour la prévention de l’usure professionnelle accessible à la FPH est positive, mais il ne faut pas perdre de vue que depuis des années les établissements médico-sociaux, et tout particulièrement les EHPAD, affichent un taux de sinistralité supérieur à celui du BTP sans qu’aucune voie d’amélioration ne soit trouvée, faute de financement à hauteur des besoins, notamment en effectifs.

La gestion de la fin de carrières ainsi altérée d’un si grand nombre de personnes se fera au détriment des conditions de travail de toutes les équipes. Cela ne fera qu’accentuer le cercle vicieux du défaut d’attractivité dans lequel nous sommes englués au quotidien. A l’heure où les effectifs des structures médico-sociales de la FPH accusent une baisse de 0,3 % en 2021, selon les derniers chiffres de l’emploi public, cette mesure est déraisonnable.

A ce jour, l’effort d’accompagnement des fins de carrières et de reclassement non financé accentue lourdement le cercle vicieux des constructions budgétaires devenues impossibles. Cela concourt aux difficultés de trésorerie sans précédent que les EHPAD publics ont connu sur l’année 2022. Selon une enquête de la Fédération Hospitalière de France publiée en janvier, 85 % prévoient un déficit, dépassant en moyenne les 3 000 euros par place. Depuis 2019, la baisse d’activité est estimée à 2,75 %. Les charges d’hébergement ayant augmenté de 9 % en trois ans, à un rythme supérieur à celui des tarifs hébergement et dépendance dont la plupart des départements se désengagent, le manque à gagner se chiffrerait à 245 millions d’euros en 2022. Il en va maintenant de la survie de ces établissements pour lesquels une loi ambitieuse reste attendue, allant bien au-delà de la récente proposition de loi sur le bien vieillir.

L’attractivité des métiers de la santé passe par un traitement équitable de l’ensemble des agents de la FPH, à commencer par le versement du CTI aux catégories professionnelles qui en sont encore exclues. Les secteurs sanitaire et médico-social recensent de nombreux postes vacants, y compris dans la catégorie de personnel « non soignant », rendant urgente la mise en place de politiques structurantes. Mais aborder l’attractivité des métiers sous le seul angle des revalorisations salariales en laissant de côté les enjeux du sens et de la qualité de vie au travail est une solution partielle. Il en va aussi de la qualité des prises en charges des populations accueillies, altérées faute de personnel soignant en nombre suffisant. L’engagement pris par le gouvernement est la création de 50 000 postes dans les EHPAD en cinq ans, mais seulement 3 000 sont financés par la loi de financement de la sécurité sociale 2023. Ce manque de moyens compromettant le droit à un accompagnement individualisé a été pointé par la Défenseure des droits qui, suite aux 281 nouvelles réclamations reçues depuis son rapport de mai 2021, réitère à juste titre sa recommandation d’un ratio minimal de huit professionnels pour dix résidents.

La perte d’attractivité du secteur se mesure également au travers de la désaffection pour les emplois supérieurs de D3S. L’instance collégiale de ce jour en est une fois de plus l’illustration. Sur 40 emplois publiés, la moitié ne suscite aucune candidature. Les emplois donnant accès à l’échelon fonctionnel comptent au mieux trois candidatures et sur les autres emplois, un seul recueille sept candidatures, les autres enregistrant entre un et quatre candidats dans le meilleur des cas.

De même, les statistiques produites par le CNG qui seront étudiées lors du CCN d’installation du 27 janvier confirment un solde d’entrées-sorties négatif pour le corps des D3S depuis 2014 et un doublement du nombre de détachements en dix ans. En regard, rien n’a été fait pour contrecarrer la perte d’attractivité et les mêmes constats sont faits depuis une décennie. Seules les dispositions de la loi 3DS ont été imposées aux D3S dirigeant les foyers de l’enfance et les MECS avec leur lot de difficultés non maitrisées par les conseils départementaux.

Une autre décision plus récente et tout aussi néfaste pour l’attractivité des emplois de D3S a été l’interprétation restrictive de la PFR des emplois donnant accès à l’échelon fonctionnel. Les chefs d’établissement se voyaient désormais refuser le barème de la PFR de ces emplois tant qu’ils n’avaient pas atteint l’échelon fonctionnel. Le SYNCASS-CFDT a alerté le CNG et la DGOS dès le mois de décembre. Le 23 janvier, le sous-directeur des ressources humaines de la DGOS nous a confirmé qu’il convient de revenir à la règle négociée lors de la mise en œuvre de la PFR, engagement issu du protocole d’accord du 29 juillet 2011 : les montants de référence de la PFR pour l’accès à l’échelon fonctionnel doivent être attribués en considération de l’emploi occupé et non de l’atteinte de l’échelon fonctionnel. La FAQ du CNG relative à l’évaluation modifiée de manière restrictive en catimini en décembre va être rectifée en ce sens.

Cette correction à la suite de notre interpellation est la bienvenue, mais elle ne fait que maintenir une page blanche. Il est urgent que des mesures appropriées soient mises en œuvre pour que le corps des D3S cesse d’être au mieux un corps de passage vers celui des DH ou au pire un corps en voie d’extinction… Cela passe désormais par la déclinaison de la réforme de la haute fonction publique dans le versant FPH.

Les organisations syndicales des directeurs ont été reçues le 17 janvier conjointement par les cabinets du ministre de la fonction et de la transformation publiques et du ministre de la santé et de la prévention. Etaient également présents la sous-direction RH de la DGOS et le CNG. Le SYNCASS-CFDT a rappelé qu’il souhaite qu’une négociation formelle s’ouvre avec des améliorations statutaires pour tous les directeurs, même si à ce jour nous n’avons pas obtenu de réponses claires de la DGOS sur la méthode et le périmètre des discussions. Mais c’est bien de l’arrimage à cette réforme pour les trois corps de directeurs de la FPH dont nous voulons discuter. Le cabinet a annoncé la volonté de la mise en œuvre de cette réforme pour la FPH au 1er janvier 2024, un calendrier de discussions devant nous être prochainement annoncé.

Le SYNCASS-CFDT a construit un projet qui repose sur des fondamentaux : l’unicité statutaire entre le corps de DH et le corps de D3S en fait partie, comme notre projet pour les directeurs des soins d’être enfin reconnus statutairement comme des directeurs adjoints à part entière. C’est un tout cohérent qui doit décliner les améliorations de la haute fonction publique de l’Etat en cours… sans nier nos responsabilités et nos conditions d’exercice spécifiques. C’est dans ce cadre que les directeurs, tous les directeurs de la FPH, pourront obtenir des avancées. Le SYNCASS-CFDT est prêt à s’engager dans cette négociation qui traduira le respect et la reconnaissance de nos fonctions de direction par les autorités, contrepartie logique de nos responsabilités croissantes et de notre engagement constant.