La fin du quinquennat qui s’annonce est l’occasion de tirer un bilan et d’évaluer les perspectives concernant les D3S. Un exercice, malheureusement empreint de frustration devant les rendez-vous manqués : abandon de la loi grand âge, mais maintien de loi 3DS, attribution parcellaire du CTI… Les perspectives esquissées par la feuille de route « EHPAD-USLD 2021-2023 » ne permettent pas non plus de verser dans l’optimisme. Les D3S attendent une réforme ambitieuse confortant les effectifs et leur qualification, dans un secteur aujourd’hui impuissant à attirer et fidéliser de nouveaux professionnels, dont les directeurs.
La déclaration liminaire du SYNCASS-CFDT
« Alors que nous sommes appelés à voter cette fin de semaine pour désigner un nouveau chef de l’Etat, nous ne pouvons que dresser un bilan décevant du quinquennat et plus particulièrement des demi-mesures prises ou celles auxquelles les pouvoirs publics ont renoncé. Ce tableau sans reliefs, impactera une fois encore durablement le champ d’activité des établissements sociaux et médico-sociaux. Un total manque de perspectives intelligibles et disons-le intelligentes en sera la marque principale.
Ces deux dernières années ont apporté leurs lots d’évènements qui brouillent tous les repères, bousculent toutes les certitudes, et nourrissent toutes les inquiétudes. A dix ans de politique de limitation des dépenses publiques au nom de la compétitivité de l’économie a succédé une fuite en avant, que les échéances électorales de 2022 ont accru. Cependant l’inquiétude reste de mise dans les établissements de la FPH, toujours en attente de compensations financières à hauteur de leurs dépenses (surcoûts et mesures de revalorisation du Ségur, intérim paramédical et médical, prime COVID, prime grand âge…) entendant toujours la même réponse des ARS : toutes les dépenses ont bien été compensées au niveau macroéconomique, suggérant ainsi que l’échelon micro n’engage pas une responsabilité partagée, mais ne relèverait que de la « bonne gestion des directions ».
Ces deux dernières années, le grand public a découvert que la France payait mal les métiers du soin et de l’accompagnement. Le Ségur a entamé un mouvement de rattrapage réel et nécessaire mais dont les effets positifs ont du mal à se concrétiser sur le terrain : la préoccupation majeure dans les établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux porte toujours sur les manques de personnels qualifiés et les difficultés de leur recrutement. Un regain d’attractivité de ces métiers est loin d’être acquis, encore moins parmi les exclus du CTI ! C’est la première fois que l’on voit un gouvernement discriminer ainsi les agents d’un même versant de la fonction publique et exerçant le même métier auprès des plus fragiles.
Les directeurs exerçant dans le champ du handicap ne cessent de pointer la situation critique des établissements, faute de pouvoir retenir et /ou remplacer les agents travaillant sur ce secteur. Ils se retrouvent totalement démunis pour assumer leur responsabilité de continuité et de sécurité des prises en charges des usagers. Leurs alertes même lorsqu’il s’agit de fermetures de structures et d’arrêts de prises en charge, restent vaines et sans réponses. Le courrier spontanément adressé à la secrétaire d’Etat chargée des personnes handicapées par un grand nombre de directeurs alarmés ne reçoit qu’un silence assourdissant en guise de réponse. Faudra-t-il vraiment attendre de multiplier encore les fermetures de services ou la survenue d’un évènement dramatique pour prendre conscience de la gravité de notre situation ?
Concernant la prise en charge du grand âge, la loi annoncée longtemps comme une priorité est passée aux oubliettes. Place maintenant à la feuille de route « EHPAD-USLD 2021-2023 » visant à renforcer la médicalisation des EHPAD. Cette dernière présente cependant peu d’idées nouvelles : le retour à la généralisation du tarif global réclamé depuis des années par les professionnels, ou certaines actions déjà engagées telles que les EHPAD « centres ressources » ou la reconnaissance du statut des IDEC. En revanche, d’autres propositions interrogent comme la requalification des USLD, prévoyant la transformation d’une partie de ces lits en unités de soins prolongés complexes (USPC) à vocation strictement sanitaire (10 000 lits selon la proposition du rapport JEANDEL-GUERIN), les autres lits d’USLD basculant sur le champ médico-social des EHPAD. Cette évolution est conditionnée par les auteurs du rapport à un renforcement médico-soignant des EHPAD et donc à un financement à hauteur de ces besoins, largement sous-évalué actuellement. Cette feuille de route ne dit rien de ces moyens…
Dans les suites du scandale ORPEA, que dire de la crédibilité de la vague d’inspection annoncée par la ministre au regard de l’entreprise de délégitimation des contrôles à laquelle nous avons assisté depuis des années, traduite par des coupes dans les effectifs des services chargés de les effectuer ? Depuis cette annonce, certains établissements publics ont ainsi déjà eu à connaître une inspection sur la base d’un référentiel du secteur privé… En fait, ces inspections noient le poisson en détournant le regard des pratiques aux effets délétères dénoncées dans le secteur privé lucratif. Il va cependant falloir également s’attaquer aux causes structurelles de la montée en puissance des opérateurs privés à but lucratif dans la création des capacités en EHPAD depuis 20 ans.
Les directeurs du secteur de l’enfance auraient préféré que le calendrier parlementaire ne permette pas l’adoption de la loi 3DS. L’incertitude liée à ses effets statutaires pour les chefs d’établissements a conduit un certain nombre d’entre eux à changer de champ d’exercice professionnel et les vacances de postes n’ont plus attiré de candidatures de D3S. De nombreux conseils départementaux ne savent pas comment appliquer les dispositions de la loi et des questions restent en suspens telles que : qui doit assurer les intérims de direction, que se passera-t-il si aucune solution acceptable n’est trouvée au bout d’un an pour les D3S en fonction. Nous ne pouvons que regretter une fois de plus l’obstination de ce gouvernement refusant la solution qui aurait permis de régler toutes ces questions statutaires, en modifiant le décret relatif aux emplois supérieurs dans la FPH… Mais que faire face au « lobby » des élus locaux courtisés avant les élections nationales ?
Enfin, sur la question du statut des D3S, aucune évolution n’est intervenue sur les cinq dernières années. La diminution inexorable des effectifs du corps ne suscite pour autant aucune proposition du Ministère. Les conditions d’exercice des D3S continuent de se dégrader, le nombre d’intérims croissants à assurer sur des durées de plus en plus longues en atteste. Cela conduit le plus souvent ensuite à la création de directions communes, dont la pertinence n’est pas toujours avérée. L’obligation faite aux EHPAD publics de coopérer dans le cadre d’un groupement territorial social et médico-social (GTSMS), s’inspirant du modèle mis en place dans le secteur sanitaire avec les GHT, tel que prévu dans la feuille de route « EHPAD-USLD 2021-2023 », pourrait alors ne pas être la solution miracle, tout comme les GHT ne le sont toujours pas dans le sanitaire. La somme de pénurie ne produit pas de l’aisance. Le maillon qui manque à tout cela reste celui d’une profonde rénovation statutaire traduite par l’unicité DH-D3S.
La position du Ministère sur cette question se fait toujours attendre, sans argument nouveau ni explication. Il faudra maintenant patienter jusqu’à la fin des échéances électorales et la nomination d’un nouveau gouvernement. Nous continuerons à porter ce dossier avec toute la détermination qui est la nôtre et dans le cadre de notre action résolue avec le CH FO et l’UFMICT-CGT.
Il n’est pas question comme le font certains de se contenter d’une revalorisation au rabais maquillée sous le vocable d’alignement mis à toutes les sauces, mais en réalité totalement éloignée des résultats concrets que procurerait l’unification des statuts. Sur le terrain, dans les équipes de direction et les territoires, il y a bien un seul métier de directeur de la FPH, exercé dans ses différents secteurs, fonctions et responsabilités.
Les directeurs s’engagent au quotidien dans les contextes les plus exigeants. Ils doivent avoir en retour une reconnaissance à la hauteur de leur engagement professionnel. Le SYNCASS-CFDT y veillera ».
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