Avancement à la hors classe DH, la réponse négative du ministère : À quand, enfin, une GRH reconnaissant l’engagement des directeurs ?

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La réponse ministérielle au courrier commun des syndicats de directeurs démontre l’absence de gestion raisonnée et lucide du corps. L’application désordonnée et tardive d’un ratio promus/promouvables pour l’accès à la hors classe en fait la démonstration. Sans projection de la pyramide des âges pour visualiser les tranchées que vont creuser les futurs départs en retraite dans les effectifs de la hors classe, sans analyse du ratio de fait qu’impose la lourde condition de mobilité propre au corps, le ratio imposé pour l’avancement n’est pas une « simplification », mais une perte de substance. Cette position témoigne de l’incapacité de l’État à assurer le fonctionnement de ses propres rouages et de sa logique interministérielle.

Dans une lettre du 7 janvier, transmise au nom du Ministre de la Santé, la Directrice générale de l’offre de soins répond aux organisations syndicales qui demandaient, dans un courrier commun, l’abandon du ratio promus-promouvables pour l’accès à la hors classe des directeurs d’hôpital. Cette disposition a été imposée en 2018, sans discussion préalable, en contrepoint de l’alignement sur le statut des administrateurs civils (8ème échelon de la hors classe en hors échelle B bis et amélioration de l’accès à la classe exceptionnelle). Elle était cependant prévue avec une application différée au tableau d’avancement 2021. La réponse renvoie ainsi à la mise en balance de l’amélioration indéniable obtenue dans les deux derniers grades, avec une contrepartie contraignante en début de carrière.

L’alignement du statut des DH sur celui des administrateurs civils était une revendication du SYNCASS-CFDT, dès les évolutions favorables accordées à ces derniers en 2016, justifiée par l’égalité de traitement entre fonctionnaires aux responsabilités et compétences de même niveau, ainsi qu’aux missions et à la formation, comparables au sens de de la loi mobilité de 2009. L’alignement que nous réclamions alors dans le sens d’une gestion harmonisée des ressources humaines au sein de la fonction publique, était fondé non sur des considérations de prétendu prestige des corps, mais sur les métiers, les compétences et les responsabilités assumées.

Des discussions serrées avec notre ministère « métier », ajoutées à de nombreuses interventions de la CFDT auprès de celui de la fonction publique, avaient été nécessaires pour aboutir, après de longs mois et des engagements répétés du Ministère de la santé. Mais le décret du 3 mai 2018 réformant le statut a finalement imposé cette régression du début de carrière, reflet du poids des archaïsmes de la fonction publique d’État. Malgré les protestations des représentants des directeurs, portées collectivement, les analyses comparatives des exigences de mobilité requises et le bon sens de nos arguments, il a été ajouté aux conditions existantes de l’accès au grade de la hors classe un ratio de promus appliqué sur les effectifs promouvables.

L’iniquité entre les corps des trois versants de la fonction publique est même rappelée dans la réponse ministérielle ! Certes, l’accès à la hors classe des administrateurs civils est soumise à un ratio, mais la mobilité exigée dans leur statut ne s’applique qu’au cours de la carrière et pour l’accès aux emplois fonctionnels, tandis que le statut des administrateurs territoriaux ne prévoit pas de ratio pour l’avancement. Pour les seuls directeurs d’hôpital, la condition de mobilité est exigée pour l’accès au grade d’avancement et l’introduction d’un ratio promus/promouvables vient désormais s’y ajouter, ralentissant la carrière. Le ratio, même s’il était temporairement fixé à 40 % des directeurs remplissant les conditions statutaires (6ème échelon et 4 ans d’ancienneté), ajoute une contrainte arithmétique, sans d’ailleurs de traduction en critères lisibles et équitables pour départager les collègues concernés en début de carrière.

Du point de vue de la gestion prévisionnelle, l’effet dans le temps de cette mesure qui vise à repyramider le corps de DH, dans lequel la hors classe représente actuellement près de 80% des effectifs, n’a pas été mesuré. Elle n’a pas été précédée, ni d’une projection des entrées dans le corps, ni de l’évaluation des effets du départ à la retraite des promotions les plus nombreuses, pas plus que de la transcription de la montée en charge de la classe exceptionnelle beaucoup plus tardive que pour les administrateurs civils. On pouvait espérer mieux de l’État employeur, qui a proclamé, dans le titre ronflant de la loi du 6 août 2019, son ambition de moderniser la fonction publique.

On a peine à croire que cette réponse vienne sans autre argument crédible dans le contexte actuel, marqué par la diminution vertigineuse des candidats aux concours. On reste interdit par le signal donné aux directeurs d’hôpital engagés durablement dans la tourmente de la crise sanitaire. Plus que de primes et de médailles, les directeurs réclament la reconnaissance de cet engagement sans faille. Cet ultime signe de mépris de notre Ministre, décoché sans aucun ménagement, pique au vif.

Les directeurs ne demandent pas de faveur ou de passe-droit, mais la simple reconnaissance de leur exercice professionnel. Un ratio établi à 40%, pour le seul tableau 2021, demandé par la DGOS à la fonction publique, reste à confirmer, sans délai annoncé, comme s’il fallait des mois de tergiversations pour une décision aussi basique. Il permettrait certes dans un premier temps de limiter l’ampleur des dégâts, mais l’annonce d’un taux dégressif pour les années à venir laisse entière la question des effets sur le pyramidage et présente toutes les caractéristiques d’une mesure de rabot budgétaire.

Aussi, le SYNCASS-CFDT maintient catégoriquement sa revendication de suppression du ratio promus/promouvables et ne se satisfait pas d’une application imposée par le gouvernement, même temporairement majorée :

  • Parce que nous avons une conception exigeante de la gestion du corps, le SYNCASS-CFDT réclame qu’un travail sérieux de projection de la démographie sur la répartition par grades soit réalisé.
  • Parce que nous restons convaincus que la GRH est impossible sans dialogue social engageant, le SYNCASS-CFDT veut une négociation statutaire.
  • Parce que nous ne sommes pas résignés à de fausses analogies entre corps, le SYNCASS-CFDT demande la prise en compte de nos conditions réelles d’exercice, pas une QVT inscrite pour ordre dans une politique frappée de cécité.

Mais le SYNCASS-CFDT ne tiendra pas un discours illusoire à nos collègues en attente : dans l’immédiat, il sera impossible d’élaborer le tableau d’avancement 2021 à la hors classe, sans définition préalable du ratio promus/promouvables imposé par le décret statutaire. Seul un autre décret aurait permis de définir une procédure dérogatoire, demande définitivement écartée. Il faut donc disposer de l’arrêté définissant ce ratio pour entamer les travaux d’élaboration du tableau d’avancement.

L’absence de soutien de notre ministre, par cette réponse, éclaire de manière crue les conséquences d’une gestion tardive et erratique. Le tableau d’avancement 2021 ne pourra pas être élaboré, tant que le ratio ne sera pas fixé et que les critères n’auront pas été discutés et arrêtés dans les lignes directrices de gestion. Le SYNCASS-CFDT va intervenir encore auprès du Ministère de la fonction publique pour décrocher le ratio 2021 évitant le pire. Dans un contexte où l’engagement et la contribution des plus jeunes collègues ne sont pas démenties, c’est la seule solution immédiate, même si elle ne contribue ni à la reconnaissance, ni à l’attractivité du corps et du métier.

Redisons-le, nous sommes à la fin d’un système. Chacun le mesure et nous le constatons collectivement. Mais le diagnostic partagé, hélas, ne débouche pas sur les mesures correctrices espérées. Il est cependant inlassablement exigé des directeurs de gérer les établissements comme si de rien n’était, malgré des tendances lourdes ajoutées aux nombreuses autres contraintes, juridiques, financières, structurelles, qui se renforcent en permanence jusqu’à en faire une mission impossible.

L’État doit prendre en compte toutes les leçons de la crise et entendre nos attentes. Nous voulons négocier un projet modernisé de gestion des directeurs, en cohérence avec nos responsabilités et avec les enseignements de la crise sanitaire, afin d’assurer les conditions d’un management éthique. La situation ne fait que rendre plus urgente la concertation avec le ministère, pour laquelle nos propositions sont sur la table. Les directeurs ont droit à un dialogue constructif pour consolider leur exercice professionnel.

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